Le mindset, on entend constamment dire que c’est la clé de tout succès. Mais et si on l’avait mal compris depuis le début ?
Le test de QI (quotient intellectuel) est mal utilisé depuis des décennies, mais personne n’en parle. Créé en 1905 par le pédagogue et psychologue français Alfred Binet, il n’a jamais eu pour but de figer votre potentiel intellectuel. Au contraire, Alfred Binet a conçu ce test au début du 20e siècle, principalement pour répondre à un besoin pratique dans le système éducatif français.
À l’époque, l’État cherchait à identifier les enfants ayant des difficultés d’apprentissage afin de leur offrir une aide spécialisée. L’objectif de Binet n’était pas de mesurer l’intelligence de manière absolue, mais plutôt de déterminer quels enfants étaient en retard par rapport à leur groupe d’âge et avaient besoin d’un soutien pédagogique.

Certains philosophes modernes… affirment que l’intelligence d’un individu est une quantité fixe qui ne peut être augmentée. Nous devons protester et réagir contre ce pessimisme brutal… avec de la pratique, de l’entraînement et surtout de la méthode, nous parvenons à augmenter notre attention, notre mémoire, notre jugement et littéralement à devenir plus intelligents que nous ne l’étions auparavant.
– Alfred Binet
En 1905, avec son collaborateur Théodore Simon, Binet a mis au point un test basé sur l’évaluation de plusieurs compétences cognitives telles que la mémoire, la compréhension et le raisonnement.
Ce test a été conçu pour être flexible et évolutif, avec des questions dont la difficulté augmentait en fonction de l’âge. Le test de QI est donc en réalité, le symbole ultime de l’évolutivité de l’intelligence.
Cela nous amène à l’emblématique professeure de psychologie sociale, Carol Dweck qui a étudié la question de l’intelligence sous un angle totalement inattendu pendant environ quatre décennies. Tout est parti d’une seule interrogation :“Pourquoi certaines personnes fleurissent-elles face aux défis tandis que d’autres abandonnent ?”
Les réponses que j’ai découvertes dans son best-seller Mindset : The New Psychology of Success m’ont laissée sans voix. Et je parie qu’il en sera de même pour vous ! Je vous laisse donc plonger dans ce bain de sagesse à travers mon résumé du livre culte.
Être un génie, ça ne s’apprend pas… vraiment ?

Carol Dweck a formulé une théorie qui change la donne : votre état d’esprit détermine votre manière d’affronter les défis. Et il en existe deux types :
- Le fixed mindset : vous pensez que vos qualités sont figées. Soit vous êtes intelligent, soit vous ne l’êtes pas. Soit vous êtes doué, soit vous ne l’êtes pas.
- Le growth mindset : vous croyez que vos qualités fondamentales peuvent être développées avec de l’effort, de bonnes stratégies et l’envie d’apprendre.
Christopher Reeve, le célèbre Superman, incarne le growth mindset à l’extrême. Après un accident qui l’a laissé paralysé, tous les médecins étaient formels : il ne pourrait plus jamais faire le moindre mouvement.
Sa moelle épinière était sectionnée. Mais il a refusé ce verdict. Il s’est entraîné intensément, chaque jour, malgré les protestations des médecins. Sept ans plus tard, il avait accompli ce que la science jugeait autrefois impossible.
En 2002, il avait retrouvé des mouvements dans ses doigts, ses orteils et ses poignets, pouvait ressentir le chaud, le froid, ainsi que la piqûre ou la pression sur la majorité de son corps, et respirer seul jusqu’à 90 minutes. Ses progrès ont bouleversé les attentes médicales. Sa fondation a même lancé le NeuroRecovery Network, qui promeut aujourd’hui des thérapies actives dans le monde entier.
Pensez également à Tiger Woods. Il a brisé le mythe selon lequel trop de musculation nuirait à la précision des coups. Grâce à une routine rigoureuse mêlant sport intense et entraînements acharnés, il est devenu le golfeur le plus influent de l’histoire.
Vous vous êtes peut-être déjà reconnu dans l’un de ces deux états d’esprit. Fixed ou growth ? Ce n’est pas celui que vous rêvez d’avoir qui compte ici, mais bien celui que vous aviez… jusqu’à maintenant.
Voici un petit quizz de 6 questions pour clarifier les choses. Répondez à ces affirmations par « Vrai » ou « Faux ».
(Inutile de tricher, personne ne vous voit petit génie)
Faites le quizz
- Le niveau d’intelligence que l’on a est assez stable tout au long de la vie.
- Quand on est doué pour quelque chose, cela vient naturellement, sans efforts.
- Les plus grandes success stories concernent les personnes ayant un talent naturel pour leur domaine.
- On peut toujours s’améliorer dans n’importe quel domaine, peu importe son niveau de départ.
- Les défis me motivent à essayer plus fort, même si j’échoue plusieurs fois.
- Voir les autres réussir m’inspire plus que cela ne me décourage ou ne me fait me sentir inférieur.
Voir les résultats
- Si vous avez répondu « Vrai » aux questions 4, 5 et 6, vous avez des traits du growth mindset.
- Si vous avez répondu « Vrai » aux questions 1, 2 et 3, vous vous situez davantage du côté du fixed mindset.
- Vous avez un peu des deux ? Votre tendance va certainement vers le fixed mindset. Pourquoi pas vers le growth mindset ? Parce qu’il est rare de retrouver des traits de fixed mindset chez une personne profondément ancrée dans une dynamique de croissance. Mais il y a une nuance que vous allez découvrir dans les lignes suivantes.
Chez La Traceuse de Chemin, nous nous concentrons sur votre carrière : études, travail, projets. Mais le mindset touche à tous les domaines de la vie. Pensez-vous pouvoir faire évoluer absolument tout ce qui vous constitue comme être humain ?
- Votre caractère ;
- Vos compétences ;
- Votre personnalité ;
- Vos croyances religieuses ;
- Ce qu’on appelle “votre nature” ;
- Votre façon d’aimer (famille, amis, chéri.e).
Vous avez certainement dit oui pour certaines choses et non pour d’autres. C’est tout à fait normal. L’état d’esprit n’est figé chez aucun humain. Vous pouvez très bien avoir un growth mindset dans un domaine et un fixed mindset ailleurs.
Mieux encore, votre manière de penser peut fluctuer dans chaque domaine au fil du temps. Merci à cette plasticité de votre cerveau qui vous donne toutes les chances de redesigner votre univers mental en lisant cet article !
Mais avant d’aller plus loin, lançons les paris : selon vous quel est mon mindset ?
Suicide, dépression, tricherie… Les sombres couloirs du fixed mindset

Vous pensez peut-être que le mindset est juste un concept abstrait qui n’influence que votre rapport à l’apprentissage. Mais en réalité il impacte profondément votre comportement, vos décisions et même votre santé mentale.
Si je perds une étoile, je me tue
– Bernard Loiseau
L’étrange suicide de Bernard Loiseau
Dans son livre, Carol Dweck propose une analyse psychologique du suicide de Bernard Loiseau, qu’elle relie en partie au fixed mindset. Loiseau, chef triplement étoilé depuis 1991 pour son restaurant La Côte d’Or, était une figure de proue de la gastronomie française.
En 2003, sa note Gault & Millau chute de 19/20 à 17/20. Des rumeurs courent aussi sur la possible perte d’une étoile Michelin, information que le Guide Michelin réfutera plus tard.
Toutefois le chef a subi une forte pression liée à des critiques et avertissements du Guide Michelin sur la qualité de sa cuisine. Notamment un entretien avec Derek Brown, directeur du guide, évoquant un manque d’âme dans sa cuisine. Cette pression a été prise très au sérieux par Loiseau selon les documents révélés
Quelques jours après Loiseau met fin à ses jours avec un fusil de chasse. De nombreux témoignages ont d’ailleurs rapporté qu’il disait : « Si je perds une étoile je me tue ».
Cette phrase glaciale, même si on ignore si elle était sincère ou non, incarne bien la logique du fixed mindset : une pensée où votre identité et votre valeur personnelle sont entièrement définies par votre capacité à ne jamais échouer.
Important de préciser que Loiseau souffrait également de troubles bipolaires comme l’a révélé son épouse Dominique. La maladie a pu jouer un rôle dans son acte. Mais ce que Dweck souligne, c’est que ce mode de pensée rigide couplé à des troubles de l’humeur a pu précipiter l’irréparable.
Et je peux vous dire que, pour avoir longtemps baigné dans le fixed mindset, cette analyse résonne profondément en moi. Depuis mon enfance on m’a toujours vue comme naturellement brillante, rapide et douée. J’étais félicitée parce que je comprenais « sans effort » (ce qui n’est pas totalement vrai).
Alors quand j’ai commencé à rencontrer des difficultés dans mon parcours, j’ai cru que cela signifiait que je n’étais plus “intelligente”. Faire des efforts était une imposture à mon sens.
Je me décourageais au moindre obstacle et plongeais dans un état de détresse intellectuelle. Quand vous fondez toute votre valeur sur le regard extérieur et la facilité que le monde attend de vous, le moindre échec prend des proportions destructrices.
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Les puzzles de la honte
L’une des études les plus connues de Carol Dweck est celle qu’elle a menée sur des élèves avec des puzzles. Elle leur a demandé de résoudre ces puzzles puis les a divisés en deux groupes. Après une première réussite : le premier groupe a été félicité pour leur intelligence, le deuxième groupe pour leurs efforts.
Lors du second round : ceux qui avaient été complimentés pour leur intelligence ont préféré des puzzles plus faciles. En revanche, ceux qui ont été félicités pour leurs efforts ont choisi des puzzles plus difficiles et stimulants. Le fixed mindset est donc une arme redoutable pour instaurer la culture de la fainéantise et du manque d’ambition.
Quand on vous colle une étiquette positive vous avez peur de la perdre. Et quand on vous colle une étiquette négative vous avez peur de la mériter.
– Carol Dweck
Les enfants félicités pour leur intelligence ont reçu un label qu’ils voulaient préserver à tout prix : “intelligent”. Leur cerveau a donc activé le mode défensive et les a poussé à éviter le risque. En revanche ceux qui ont été félicités pour leurs efforts ont compris qu’avec du travail ils pouvaient progresser. Ils ont donc pris plus de plaisir à relever des défis.
Ce qui est encore plus fascinant, c’est que les enfants félicités pour leur intelligence régressaient avec le temps, même sur des puzzles faciles. A l’opposé, ceux qui avaient été félicités pour leurs efforts continuaient de progresser.
La conclusion de Dweck est claire : féliciter les enfants pour leur intelligence peut les enfermer dans un fixed mindset tandis que valoriser leurs efforts encourage le growth mindset.
Si vous êtes un jeune parent ou que vous prévoyez d’avoir des enfants, les compliments sur l’intelligence innée sont à bannir, pour ne pas enfermer vos petits trésors dans un fixed mindset. Plutôt, pensez à les encourager sur leurs efforts et sur les processus qu’ils empruntent pour atteindre le résultat.
Ça me rappelle d’ailleurs un procédé utilisé par les profs de science au collège. Les points attribués à la bonne réponse sont séparés des points attribués à la méthodologie. Je serais très curieuse de savoir si cette étude de Carol n’y est pas pour quelque chose. Vous aussi, n’est-ce pas ?
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Les enfants menteurs

Dans une autre étude de Dweck, ils ont fait passé un test écrit à un groupe d’enfants. On leur a ensuite fait croire qu’ils devaient écrire leurs impressions pour les partager avec d’autres écoles. Discrètement, un champ avait été réservé pour qu’ils y marquent leurs notes.
Vous devinez bien comment cela s’est terminé. 40 % des enfants ayant un fixed mindset et de mauvais résultats ont menti. Ils ont augmenté leur score pour paraître meilleurs. Puisqu’ils croient que l’intelligence est figée, l’échec remet en cause leur valeur personnelle. Ils préfèrent donc tricher plutôt qu’assumer un échec.
C’était tout le contraire chez ceux qui ont un fixed mindset. Ils n’avaient aucun mal à assumer leurs résultats parce que ces notes ne définissaient ni leur identité ni leur valeur. Au contraire, elles leur indiquaient qu’il fallait fournir plus d’efforts.
C’est l’un des effets les plus sombres du fixed mindset : la peur de l’échec peut mener au mensonge, à la triche, à la dissimulation… et même à des formes de dépression ou de désespoir à l’âge adulte.
On a transformé des enfants ordinaires en menteurs. Juste en leur disant qu’ils sont intelligents.
– Carol Dweck
L’avenir n’est rien, l’intelligence est tout
Une autre étude a été effectuée à l’Université de Hong Kong sur la théorie du mindset de Carol Dweck. Des étudiants non anglophones venaient de s’inscrire. Leur mindset respectif a été évalué par les enquêteurs.
Puis, étant donné que tous les cours et activités se déroulaient en anglais, on leur a tous proposé des cours pour améliorer leur niveau. Ceux qui avaient un growth mindset ont vu cette proposition comme une opportunité d’apprendre. Leur oui ne s’est pas fait attendre.
Mais étonnamment, ceux avec un fixed mindset ont refusé, craignant que cela n’entache leur image. Ils ont préféré saboter leur avenir plutôt que de se confronter à leurs lacunes.
La maladie du PDG (CEO disease)

La CEO disease carbure au fixed mindset. Il s’agit d’un état où, en tant que dirigeant, vous vous appuyez uniquement sur vos forces pour obtenir des résultats rapides et visibles, sans reconnaître ni travailler sur vos faiblesses.
Avec un fixed mindset, vous percevez chaque critique comme une menace. Vous cherchez alors à la fuir, la nier ou à en écraser l’auteur. Et c’est précisément ainsi que la maladie du PDG s’installe pour de bon : lorsque le besoin de protéger votre image l’emporte sur le bien-être de l’entreprise.
Lire plus : Cas emblématiques : Lee Iacocca, Albert Dunlap et les dirigeants de A&P
Ces dirigeants illustrent bien les dérives d’un fixed mindset :
- Face à l’échec : colère et déni
Lee Iacocca rejetait systématiquement la faute sur autrui — concurrence étrangère, employés ou marché — refusant de remettre en question ses propres décisions.
- L’ego avant l’entreprise
Tous deux ont consacré temps et argent à leur image personnelle, y compris lorsque leur entreprise avait besoin d’investissements stratégiques.
- Feedback interdit, talents étouffés
Iacocca écartait les collaborateurs brillants qu’il percevait comme des menaces. Son besoin constant d’avoir raison empêchait toute innovation autour de lui.
- Vision court terme
Albert Dunlap privilégiait des profits rapides via des coupes drastiques, souvent au détriment de la santé à long terme des entreprises qu’il dirigeait.
- Rigidité face au changement
Même lorsque les résultats prouvaient l’échec de leur stratégie, ils refusaient de changer de cap, de peur de heurter leur ego.
Lee Iacocca
Voici un extrait de Mindset : the new psychology of succes de Carol Dweck sur le cas de Lee Iacocca.
« Quelques années seulement après son départ humiliant de Ford, il put écrire une autobiographie triomphante et y déclarer : « Aujourd’hui, je suis un héros. »
Mais peu de temps après, Chrysler [l’entreprise dont il venait de prendre la direction et qu’il avait sauvée d’une faillite imminente] était de nouveau en difficulté. Le fixed mindset d’Iacocca ne pouvait rester en veille. Il avait besoin de prouver sa grandeur — à lui-même, à Henry Ford, au monde — à une échelle toujours plus grande. Il consacrait son temps chez Chrysler à des actions qui embellissaient son image publique, et il dépensait l’argent de l’entreprise dans des projets destinés à impressionner Wall Street et à faire grimper le cours de l’action Chrysler. Mais il faisait cela au lieu d’investir dans de nouveaux modèles de voitures ou dans des améliorations industrielles qui auraient permis à l’entreprise de rester rentable à long terme.
Il se tournait aussi vers l’histoire, soucieux de la manière dont il serait jugé et dont on se souviendrait de lui. Mais il ne répondait pas à cette préoccupation en construisant l’entreprise. Bien au contraire.
Selon l’un de ses biographes, il craignait que ses subordonnés ne reçoivent le mérite de nouveaux modèles réussis, alors il hésitait à les approuver. Il craignait, à mesure que Chrysler déclinait, que ses subordonnés soient vus comme les nouveaux sauveurs, et il essayait donc de s’en débarrasser. Il avait peur d’être effacé de l’histoire de Chrysler, alors il s’accrochait désespérément à son poste de PDG bien après avoir perdu toute efficacité.
Iacocca avait une occasion en or de faire une vraie différence, de laisser un grand héritage. L’industrie automobile américaine faisait face à son plus grand défi : les importations japonaises prenaient le marché d’assaut. C’était simple : elles étaient plus belles et plus fiables. Les équipes d’Iacocca avaient mené une étude approfondie sur Honda et lui avaient fait d’excellentes recommandations.
Mais au lieu de relever le défi et de produire de meilleures voitures, Iacocca, prisonnier de son fixed mindset, n’a livré que des reproches et excuses. Il est parti en croisade, multipliant les diatribes contre les Japonais et réclamant que le gouvernement américain impose des droits de douane et des quotas pour les stopper.
Dans un éditorial contre Iacocca, le New York Times a réprimandé : « La solution consiste à fabriquer de meilleures voitures dans ce pays, pas à multiplier les excuses furieuses contre le Japon. »
Et Iacocca ne progressait pas en tant que leader de ses équipes. En réalité, il régressait, devenant le tyran isolé, mesquin et punitif qu’il avait autrefois accusé Henry Ford d’être. Non seulement il renvoyait ceux qui le critiquaient, mais il faisait peu cas des travailleurs qui s’étaient sacrifiés pour sauver l’entreprise.
Même quand l’argent affluait, il ne montrait guère d’intérêt pour le partager avec eux. Leurs salaires restaient bas et leurs conditions de travail mauvaises. Pourtant, même lorsque Chrysler était à nouveau en difficulté, il continuait à mener une vie royale. Deux millions de dollars furent dépensés pour rénover sa suite de direction au Waldorf à New York.
Finalement, alors qu’il était encore temps de sauver Chrysler, le conseil d’administration a doucement écarté Iacocca. On lui a accordé une retraite dorée, des stock-options généreuses et le maintien de nombreux avantages. Mais il était fou de rage, surtout parce que son successeur semblait gérer l’entreprise avec succès. Alors, dans une tentative de reconquérir le trône, il s’est joint à une tentative d’OPA hostile, mettant en péril l’avenir de Chrysler.
Ce fut un échec. Mais pour beaucoup, le doute fut levé : Iacocca avait bel et bien placé son ego avant le bien de l’entreprise. »
Albert Dunlap
Albert Dunlap, surnommé « Chainsaw AI » (littéralement, intelligence artificielle tronçonneuse), est tristement célèbre pour ses stratégies de réduction des coûts extrêmement agressives.
Son obsession pour les profits immédiats — obtenus via des licenciements massifs et des coupes sévères — a nui à la santé de ses entreprises qu’il dirigeait. En 1976, il a été licencié de Nitec pour manipulations des résultats.
En 1998, sa carrière s’est terminée sur un gros scandale : il a été licencié par Sunbeam à la suite de plusieurs déceptions financières et de la découverte d’une fraude massive qu’il avait orchestrée.
La chaîne d’épiceries A&P
Dans les années 1970, l’exemple de l’épicerie A&P est encore plus fascinant, voire même étrange. Chaque fois que les dirigeants de l’épicerie mettaient en place un nouveau style de boutique et que ce style commençait à avoir plus de succès que les anciens, ils fermaient automatiquement la nouvelle boutique. Après tout, ils étaient censés être tout puissants. Leur anciennes idées se devaient donc de rester les meilleures, peu importe le prix à payer.
Les leaders féminins avec le fixed mindset
Certaines femmes leaders présentent aussi ces signaux. Ellen Pao, alors CEO de Reddit, a été critiquée en interne pour son manque d’écoute et de flexibilité. Elle a quitté ses fonctions dans un climat de conflit. Marissa Mayer, ex-CEO de Yahoo, a été perçue comme rigide dans sa gestion, focalisée sur les détails au détriment d’une vision plus ouverte et collaborative.
À l’opposé de tous ces exemples, un CEO avec un growth mindset accueille les retours, même désagréables. Il ne cherche pas à briller, mais à comprendre et à progresser.
Il instaure une culture où chacun peut s’exprimer librement, sans crainte de représailles. Et surtout, il crée un climat dans lequel l’entreprise qu’il dirige peut prospérer sur le long terme.
Lire plus : Satya Nadella, à son arrivée chez Microsoft
Satya Nadella, à son arrivée chez Microsoft, a interrompu cette spirale. Il a encouragé les feedbacks directs, revalorisé l’apprentissage et replacé l’humilité au cœur du leadership. Résultat : une culture plus saine et une entreprise relancée.
Lire plus : Lou Gerstner à son arrivée chez IBM
Lorsqu’il a pris la tête d’IBM en 1993, l’entreprise était au bord de la faillite. Il ne venait ni de la tech ni d’IBM. Il a commencé par écouter : il a interrogé les équipes, rencontré les clients, refusé de se laisser guider par l’orgueil ou les anciennes certitudes. Son mantra : comprendre avant d’agir.
Il a abandonné l’idée de démantèlement, parié sur l’intégration et redonné confiance aux équipes. Résultat : IBM a retrouvé son succès. Et pourtant, Wall Street et les experts désapprouvaient ses méthodes au départ.
Lire plus : Des CEO africains incarnent également le growth mindset
- Terry Billson (Genergy, Afrique du Sud) : Il met en avant la curiosité, l’ouverture à l’apprentissage et la capacité d’adaptation comme piliers de croissance pour son entreprise d’énergie renouvelable.
- Yolanda Cuba (MTN Group, Afrique australe et orientale) : Son parcours montre une capacité à tirer des leçons des erreurs et une foi dans la transformation personnelle.
- James Mworia (Centum Investment, Kenya) : Il est reconnu pour ses revues régulières des progrès et son ajustement stratégique permanent, qui signent la culture de l’apprentissage constant.
- Funke Opeke (MainOne, Nigéria) : Son approche financière rigoureuse et sa capacité d’adaptation montrent un véritable engagement à apprendre et à évoluer.
- Naledi Pandor (Afrique du Sud) : Elle illustre l’apprentissage tout au long de la vie et l’adaptabilité, tant dans la sphère politique qu’économique.
- Aliko Dangote : Son style de leadership se distingue par une vision claire, une ambition constante et un engagement fort envers l’innovation et l’expansion durable. Il fixe des objectifs audacieux, adapte ses stratégies selon les évolutions du marché et transforme chaque défi en occasion d’apprentissage.
Des électroencéphalogrammes figés
Des recherches sur les ondes cérébrales menées à l’Université Columbia ont révélé que l’activité cérébrale des personnes avec un fixed mindset était bien spéciale. Pendant les expériences de Dweck, on enregistrait leur activité cérébrale lorsqu’elles répondaient à des questions complexes et recevaient des retours.
Les personnes au fixed mindset montraient une activité cérébrale surtout lorsqu’elles recevaient une évaluation (bonne ou mauvaise réponse), mais aucune activité cérébrale quand on leur donnait des informations utiles pour progresser. Même en cas d’erreur, elles ne portaient pas attention à la bonne réponse. Vous êtes choqué ? Il y a de quoi être choqué !
En revanche, les personnes growth-minded restaient attentives aux retours susceptibles d’élargir leurs connaissances, que leur réponse soit correcte ou non. Elles privilégiaient toujours l’apprentissage.
Cette étude montre que l’état d’esprit influence l’attention et la motivation à apprendre, à un niveau neurologique. Ce n’est donc pas qu’une affaire de psychologie. C’est aussi une affaire de physiologie !
Plus ils dépriment, plus ils s’investissent
D’autres études menées dans le cadre des recherches de professeure Dweck ont démontré que les étudiants ayant un fixed mindset sont plus susceptibles de développer des symptômes dépressifs.
Ces derniers se sentent souvent impuissants face à l’échec. Ils interprètent leurs erreurs comme des preuves de leur incapacité. Et cet état psychologique porte un nom : l’impuissance apprise.
Lorsque vous avez un fixed mindset, vous croyez que vos capacités sont figées. En cas d’échec, vous considérez vos erreurs comme une preuve d’incapacité permanente, ce qui vous amène à vous sentir impuissants face à l’échec.
Cette perception crée un état psychologique dans lequel, après avoir vécu des situations stressantes répétées et incontrôlables, vous cessez d’essayer de changer votre situation, même lorsque cela reste possible. Vous développez alors un sentiment de perte de contrôle, une baisse de motivation et des symptômes dépressifs.
À l’inverse, lorsque vous adoptez un growth mindset, même si vous ressentez de la tristesse ou de la dépression, vous ne vous laissez pas définir par l’échec. Vous agissez pour résoudre vos problèmes et considérez l’échec comme une occasion d’apprendre et de progresser.
Cette attitude s’oppose à la passivité propre à l’impuissance apprise. Le plus étonnant, c’est que les étudiants ayant un growth mindset, même en pleine dépression, redoublaient d’efforts. Et plus leur mal-être s’intensifiait, plus ils y mettaient du leur pour améliorer leur situation. C’est fou comme un simple état d’esprit peut redesigner toute une vie !
Le mindset des professeurs impacte celui des élèves

Vos enseignants jouent un rôle essentiel dans le développement de votre mindset. Ceux qui adoptent un growth mindset croient en votre potentiel et vous encouragent à persévérer, même face aux difficultés. En revanche, ceux avec un fixed mindset ont tendance à abandonner les élèves qu’ils jugent « non doués », n’ayant pas foi en leur capacité à évoluer.
En conséquence, les enfants concernés n’ont pas l’attention ni le soutien nécessaires pour progresser, et leur potentiel reste inexploité. Ce qui me fait penser que tous les professeurs, depuis la maternelle jusqu’à l’université, devraient lire cet article. Partagez-le donc avec un professeur que vous connaissez.
Une anecdote qui me choque particulièrement jusqu’à aujourd’hui…
en lien avec le mindset des professeurs, remonte à mes années de collège. C’était jour de correction après une composition de français, et j’avais choisi d’utiliser le mot « colossal » dans mon texte. Pourquoi ce mot ? Parce que notre première de classe, avec qui j’étais tacitement en compétition, me challengeait beaucoup.
J’étais toujours deuxième derrière elle. À chaque composition, elle venait avec des expressions intéressantes et des mots nouveaux, parce qu’elle lisait beaucoup. De mon côté, je ne lisais pas autant, mais je regardais énormément d’émissions télévisées où des mots intéressants étaient utilisés. Alors, j’ai pensé que ce serait une bonne idée de glisser « colossal » dans ma composition, pour ajouter une touche originale et relever le défi.
Quand le professeur a vu ce mot, il m’a demandé ce qu’était ce mot que j’avais utilisé ? Ce jour-là, je lui ai montré dans le dictionnaire que le mot existait bel et bien. Il m’a répondu que lui ne connaissait pas ce mot et que je n’aurais pas dû l’utiliser.
Il m’a même pénalisée à cause de cela. Dingri ! Typiquement, c’est un exemple de fixed mindset. Dans son esprit, une élève ne pouvait pas connaître un mot qu’il ne connaissait pas. C’était comme s’il se sentait rabaissé, comme si je réduisais sa valeur ou insultais son intelligence.
Alors, imaginez l’impact qu’un tel comportement de la part d’un professeur peut avoir sur un élève. Le message est clair : restez au niveau où vous êtes, n’essayez pas d’évoluer ou de monter en niveau, et surtout ne dépassez pas mon niveau.
Et figurez-vous que j’ai vécu une expérience similaire avec un autre professeur de français, mais dans une autre classe. Cette fois-ci, la réaction a été totalement différente.
En plus de trouver mon initiative intéressante, le prof a adoré le petit dictionnaire de poche dans lequel je lui avais montré l’existence du mot. Il m’a dit qu’il adorerait avoir un dictionnaire comme le mien à l’avenir. Tout cela dans le sourire et la bonne humeur.
Alors… on peut tout accomplir avec le growth mindset ?

Le growth mindset ne signifie pas que vous pouvez devenir tout ce que vous voulez. Carol elle-même apporte cette nuance dans son best-seller. Elle souligne que les compétences peuvent se développer grâce à l’effort, avec de bonnes stratégies et l’aide appropriée.
Ce mode de pensée mise sur le progrès, non sur la perfection. À ce stade, j’ai probablement perdu 95 % des lecteurs qui s’attendaient à devenir Einstein, Shakespeare, Mozart ou Kobe Bryant juste par une pincée magique de growth mindset…
Il ne s’agit pas de nier ses limites
Nous avons tous des limites biologiques, sociales ou contextuelles :
- Tout le monde ne dispose pas des mêmes capacités physiques de manière naturelle.
- Tout le monde n’a pas accès à une éducation de haut niveau ou à des ressources suffisantes.
- Certains domaines exigent un niveau de réussite très élevé qui dépend de nombreux facteurs.
Adopter un growth mindset ne supprime pas ces contraintes — cela signifie simplement que vous ne baissez pas les bras au premier échec. Cela signifie aussi que vous ne vous ne pensez pas qu’il faut avoir un don naturel dans un domaine donné pour devenir un génie dans ce dernier.
Christopher Reeve (Superman, évoqué plus haut) espérait pouvoir remarcher. Il n’y est pas parvenu, compte tenu de sa situation. Mais il a réalisé des progrès qui ont marqué l’univers entier de la médecine.
Halte aux comparaisons absurdes
Le growth mindset implique aussi d’éviter les comparaisons absurdes. Par exemple, comparer la carrière de Beyoncé Knowles à celle de Solange Knowles. Ces deux femmes sont sœurs, toutes deux artistes, mais leurs trajectoires sont totalement différentes. Comparer Solange à Beyoncé en disant qu’elle a moins réussi serait une une erreur.
Beyoncé a été propulsée très jeune sous les projecteurs avec Destiny’s Child, puis a enchaîné avec une carrière solo massive, soutenue par une machine marketing, un positionnement mainstream et un perfectionnisme scénique rare.
Solange, de son côté, a toujours choisi un chemin plus expérimental, indépendant et intimiste. Son succès est plus discret, mais elle est reconnue pour son authenticité artistique, son approche avant-gardiste et son influence dans des milieux culturels très pointus.
Les deux ont réussi, mais sur des terrains différents. Les comparer en termes de grandeur ou de popularité reviendrait à nier leurs choix, leurs ambitions personnelles et leurs univers distincts.
Je vous invite d’ailleurs à découvrir l’univers artistique envoûtant de Solange Knowles. Préparez-vous à laisser sa voix déshabiller votre âme et lui faire l’amour. C’est l’une des rares artistes que je peux écouter tout en travaillant, sans être déconcentrée.
Comparer Tems et Ayra Starr relève de la même absurdité.
Tems s’est fait connaître avec une voix profonde, une direction artistique introspective et un style épuré. Sa reconnaissance est venue par des featuring avec Wizkid, Drake ou Future, qui l’ont portée vers des prix internationaux.
Ayra Starr, de son côté, est arrivée avec une énergie pop assumée, des visuels vibrants, une danse affirmée et une présence constante dans les tendances mode. Deux mondes totalement différents, même si les timbres vocaux se ressemblent.
Pourtant, certains ramènent constamment les awards de Tems ou le fait qu’Ayra porte des tenues très sexy pour rabaisser cette dernière. Ces arguments n’ont pas de tenue. Déjà parce qu’elles n’ont pas commencé au même moment.
Ensuite, parce qu’elles ne sont pas sur la même trajectoire. Enfin, il suffit d’avoir réellement exploré l’univers de Tems pour savoir qu’elle aussi flirte avec le sexy — mais selon des codes différents.
Ce que permet concrètement le growth mindset
Avec un growth mindset, vous :
- Apprenez de vos échecs au lieu de les redouter.
- Fournissez un effort régulier, même face à la difficulté.
- Cherchez à recevoir des retours plutôt que de les éviter.
- Restez flexible et curieux, attitude qui favorise une amélioration progressive.
Tout cela mène à de meilleurs résultats, peu importe d’où vous partez. Vous prendrez peut-être plus de temps que Mozart à devenir Mozart, mais si vous vous engagez sincèrement et que vous adoptez les bonnes méthodes, ne pas atteindre des résultats de plus en plus proches de ceux de Mozart devient impossible.
Pensez à Michael Jordan, légende du basketball
- Son objectif : intégrer l’équipe de basketball de son lycée.
- Ce qu’il s’est passé : recalé en classe de seconde.
- Sa réaction : il n’a pas abandonné et s’est entraîné chaque jour avec intensité.
- Résultat : il est devenu l’un des plus grands joueurs de tous les temps.
Il a d’ailleurs fait une petite pause dans sa carrière de basketball, après le meurtre de son père en 1993. Il a arrêté avec la NBA pour repartir de très bas dans le baseball.
Son objectif était d’honorer la mémoire de son défunt père qui avait toujours rêvé d’une carrière de baseballeur pour lui. Et bien que cette carrière soit souvent étouffée par le basketball, le growth mindset l’a aidé à faire des prouesses qui ont marqué l’histoire.
Ce n’est pas parce que certaines personnes réussissent quelque chose sans entraînement que d’autres ne peuvent pas y arriver (et parfois encore mieux) avec de l’entraînement.
— Carol Dweck
Ce que vous devez absolument retenir sur le mindset !
Vous êtes désormais un as de la théorie du mindset par Carol Dweck. Voici un résumé succint qui vous permettra d’en parler autour de vous en deux mots !
Deux types de mindsets ont été élaborés dans la théorie de Carol Dweck :
- Fixed Mindset
- Croit que les capacités sont figées.
- Évite les défis, abandonne facilement.
- Se sent menacé par la réussite des autres.
- Valorise le talent inné plutôt que l’effort.
- Dépend fortement de l’approbation et du regard extérieurs.
- Interprète l’échec comme une preuve d’incompétence irrémédiable.
- Growth Mindset
- Croit que les capacités peuvent se développer par l’effort et l’apprentissage.
- Accueille les défis, persévère face aux obstacles.
- Apprend des critiques et s’inspire des réussites des autres.
- Valorise l’effort et la stratégie plus que le talent inné, s’il y a.
- Dépend peu ou pas de l’approbation et du regard des autres.
- Interprète l’échec comme le signe qu’il faut redoubler d’effort.
Applications dans différents domaines :
- Éducation :
- L’évaluation basée uniquement sur la réussite et les résultats peut renforcer un fixed mindset.
- Les enseignants peuvent influencer l’état d’esprit des élèves via leurs attentes, leurs retours et leurs méthodes : un professeur fixed-minded favorise le développement d’un fixed mindset chez ses élèves et les condamne à l’échec. Tout le contraire d’un professeur growth-minded.
- Travail et entreprise :
- Les leaders avec un growth mindset créent une culture d’apprentissage et de collaboration.
- Les fixed-minded leaders créent une culture de terreur, de tricherie et de régression, menant à la chute de l’entreprise.
- Les entreprises doivent valoriser l’effort, la progression et l’apprentissage plutôt que le seul « talent ».
- Relations personnelles :
- Le growth mindset favorise l’écoute, la résolution de conflits et l’évolution mutuelle.
- Le fixed mindset conduit à blâmer, fuir les désaccords, et éviter la vulnérabilité.
Changer de Mindset
- Prendre conscience de son fixed mindset et l’embrasser
- Prendre conscience des déclencheurs de son fixed mindset
- Donner un prénom à son persona fixed-minded
- Rééduquer son persona fixed-minded
- Différencier quotidiennement les deux types de mindset à travers ses actions
- Se poser des questions orientées growth mindset
Notre ebook plus détaillé sur le process de changement de mindset est en cours d’édition. Consultez régulièrement notre toolthèque pour ne pas manquer son lancement.
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